Parlons boxe

A RETENIR

Exposition "L'appel du ring" > 3 janv 2023

A l’occasion de l’exposition temporaire « L’appel du ring », découvrez Parlons Boxe, la chronique mensuelle de Claude Boli, responsable scientifique du Musée National du Sport. Des victoires légendaires en passant par les destins les plus sombres, jusqu’aux influences diverses, vous saurez tout sur le « Noble art » !

 

EPISODE 2 : Ali-Foreman, Kinshasa 1974 : danse avec les cordes ! 

Le combat commence. Dès la première reprise, Ali surprend tout le monde en attaquant…en dansant ! Foreman, comme à son habitude, avance d’un pas ferme du pied gauche avec le poing gauche qui suit le mouvement. Il décroche quelques coups sans conséquence. Ali décroche une puissante droite en avançant l’épaule droite, face à Foreman. Geste insensé ! Sacrilège ! A ce niveau, aucun boxeur ne tente un tel geste. Il veut ridiculiser Foreman.

 

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© 2019 Ernando Febrian/Shutterstock

 

Foreman attaque, il touche violemment Ali, il le travaille au corps. Ali s’installe dans les cordes. Foreman le poursuit et donne des coups au visage, au foie. Dundee et Pacheco hurlent : Get off the rope ! get off the rope ! (barre-toi des cordes ! barre-toi des cordes !). Ali est têtu. Il n’écoute ni les conseils de son entraîneur ni ceux de son docteur ! Il donne l’impression qu’il a une stratégie en tête. Journalistes, spectateurs, téléspectateurs, nous sommes tous médusés. A un moment, Ali tient Foreman entre ses bras et lui parle, le provoque, l’insulte dira plus tard l’arbitre Zach Clayton. Il quitte les cordes et enchaîne une série de coups qui atteignent Foreman au visage. Le public exulte. Foreman est surpris par la rapidité d’exécution. Ali remporte les reprises sans forcer. Ses frappes sont plus précises. Foreman semble « lessivé » de balancer autant de coups qui n’atteignent toujours pas son adversaire.

 

 

Visiblement, suivre Ali dans les cordes, n’est pas la bonne méthode. Au sixième et septième round, la rencontre prend une tournure complètement différente. Ali reste dans les cordes mais il est plus mobile, plus dangereux. Tout en lui portant des coups appuyés, il continue d’invectiver Foreman qui ne bronche pas. Au huitième round, Foreman, de plus en plus exténué par ses coups portés dans le vide, manque de sortir du ring. Ali, lui, semble au contraire plus frais, plus percutant. Il attend Foreman dans les cordes. Et il devient de plus en plus précis dans ses coups. Soudain, il enchaîne une nouvelle série : droite, droite, gauche… Foreman s’écroule. Foreman est K.O.  Le stade est en délire. Ali bombayé, Ali bombayé ! reprend la foule. Tout le monde veut envahir le ring. On essaye de toucher, de congratuler le nouveau champion. Les flashs jaillissent, les larmes de bonheur abondent. Ali a gagné son pari. Il avait prédit une victoire facile : elle fut trop facile. Ali a dansé mais pas autant qu’il l’avait annoncé. Il a dupé tout le monde, son camp, celui de Foreman, les fans. A Kinshasa, il a inventé une technique de victoire, le rope a dope ! : se servir des cordes pour épuiser son adversaire et ensuite le laminer de coups. Dans l’histoire d’un championnat du monde de poids lourds, c’est la première fois qu’un boxeur perd parce qu’il a donné trop de coups. Ali remporte le titre de champion du monde, pour la seconde fois. Le noble art s’est trouvé grandi par la performance d’un esthète, d’un combattant et d’un boxeur à l’égo démesuré. Quel combat !  

 

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Vues de l'exposition temporaire "L'appel du ring", jusqu'au 3 janvier 2023 au Musée national du Sport